Comment expliquer que la Tora n’ait point prévu de se doter elle-même d’un emblème ? Pourquoi a-t-il fallu que des artistes, de leur propre initiative, aient à combler cette lacune ?
On peut proposer l’hypothèse suivante : il existe, en réalité, dans la Tora, une infinité de symboles. La symbolique – le Rémez – constitue l’une des quatre méthodes d’interprétation traditionnelle de l’Ecriture. Il s’agit d’une «véritable science qui comprend ses règles, ses

principes, ses normes [Rabbin E. Munk, la voix de la Tora], Le Lévitique, p. 10».
Non seulement les versets renvoient à des notions qui n’apparaissent pas dans le sens obvie du texte, mais aussi chaque Mitsva, chaque prescription religieuse se réfère à des significations qui imprègnent, même inconsciemment, la pensée et le sentiment de celui qui les accomplit, et le haussent progressivement au niveau de la sainteté.
Ainsi, les Tsitsiot, les Tefilin, la Mezouza, constituent autant de symboles prestigieux ! De sorte qu’en vérité, tout fidèle observant vit, en permanence, plongé dans un monde de symboles. Personne, plus que lui, n’est porté de manière aussi insistante à l’abstraction intellectuelle… L’existence de ce symbolisme spécifique permet de mieux concevoir la fonction éducative des Mitsvot, telle que la décrit, par exemple, l’auteur du Séfer Ha’hinoukh (Mitsva n° 16) : « (…) Aussi nos Maîtres ont-ils dit : « le Saint-béni-soit-Il a voulu accroître le mérite d’Israël, c’est pourquoi il a augmenté pour eux Lois et Commandements » - afin d’en imprégner toutes nos pensées et d’en faire l’objet de toutes nos préoccupations… Car nous subissons l’effet de nos propres bonnes actions, et nous nous améliorons grâce à elles au point de mériter le monde futur ».
Grand Rabbin Michel Gugenheim,
Extrait de "Et tu marcheras dans Ses voies" (p. 124-125), ed. Fondation Levy Paris 2009